Impossible de savoir pourquoi.

[Chapitre 25 & 26 <<<< là..]

Mais je n’ouvris toujours pas la mallette avant d’aller dormir. La poussai simplement sous mon lit sur lequel était posé mon sac à dos intact. Je l’appuyai contre le mur et je fouillai à tâtons à l’intérieur. Je ne voulais pas allumer la lumière. L’air étouffant et les ronflements remplissaient la chambre. Il flottait à cette heure une odeur persistante de chaussettes sales. Mais je m’étais allongé sur un lit qui grinçait au moindre mouvement et écartant un rideau poussiéreux j’aperçus le coin du Deli’s où des badauds s’attardaient encore. Sur la table de nuit une vieille lampe de bureau autour de laquelle on avait déposé un rosaire fatigué auquel pendait une croix en fer-blanc. À côté, fermée à clef, la mallette. Un cafard aux longues antennes se mit à l’escalader. Je le suivis des yeux tout le temps de son ascension. Je ne cessai de faire passer le liquide d’une bouteille de Jim Bean dans un gobelet de pastique. Jusqu’à ce que le sommeil me gagne. Une deuxième fois donc. Dans mon rêve. Peu avant six heures du matin j’étais réveillé. Les autres dormaient encore, je pris une douche. Saisis ensuite la mallette et dehors.
Il faisait très froid, mais ciel matinal impeccable. Un soleil presque blanc brillait à l’instant où je franchis la porte. Des gens prenaient leur déjeuner en se hâtant vers leur travail ; sous le bras gauche ils avaient coincé leur porte-documents, et tenaient à la main leur gobelet en polystyrène rempli de café. Dans la main droite le bagel. Tout le monde, du moins ceux qui travaillaient, courait ainsi à ses activités. À chaque coin de rue, un petit éventaire métallique sur roulettes dégageait des odeurs de pâtisserie. GOOD MORNING NEW YORK. À Times Square je pris mon petit-déjeuner chez RIESE’s. C’était 7 $. All you can eat. On y voyait déjà des lycéens. Ils avalaient des litres de jus d’orange. Dévoraient des ham & eggs et arrosaient de sirop d’érable une pâte trempée dans la graisse qui gonflait comme une éponge. Ça donnait un truc assez répugnant. Sans doute une question d’habitude. Malgré tout l’atmosphère était spontanée, d’une fraîcheur agréable. La mallette avait perdu son aspect angoissant. D’ailleurs, face à moi, légèrement de biais, étaient installées deux beautés fascinantes. Blonde. Châtain. Devaient avoir dans les seize, dix-sept ans. Je cherchai à capter leurs regards, mais elles ne m’accordèrent aucune attention, ne firent aucun signe. Bon, bof. Ah, quelque chose, mais vite détournée. Ces nymphettes étaient à l’image de la maison parentale ; l’argent les rendait prétentieuses et insolentes. Derrière cette belle allure se cachaient parfois bien des choses : séduire ces nanas revenait à s’exposer à des déconvenues. Elles étaient tellement malignes, sur ce fil du rasoir qui les séparait de la femme ! Ces pensées ne firent qu’accroître mon inquiétude. Voilà de quoi il fallait se protéger aux USA : Le Monde Libre était pavé de tabous, c’était désolant.
Compris à l’évidence que je ne faisais que différer la révélation : pris la mallette. Examinai les serrures. Elles s’ouvrirent sans difficulté. Grande photo bien encadrée du Maestro Olsen. Sur la deuxième, moi-même. La photo remontait à moins de douze heures, je me souvins, c’était dans la 6th Avenue, je rêvassais en me promenant dans downtown Manhattan, lorsque tout à coup : … Éclair déchirant de lumière et de bruit ! – Cette chemise. Cette cravate. Ce costume. Talisker était-il à ma poursuite ? Et pourquoi en voulait-il aussi à Olsen ? Sur la photo qui me représentait, on avait inscrit « un » au stylo d’argent, et « deux » sur celle d’Olsen. Pour me calmer je regardai à nouveau les jeunes filles. Bavardage incessant. Deux lourdes enveloppes. Au début je ne voulus même pas y toucher. La valise contenait une metrocard, un billet pour un concert qui avait lieu le 16 au Carnegie Hall, donc aujourd’hui, ainsi que les deux clefs qui avaient cliqueté tout à l’heure. Au porte-clefs était accroché un morceau de plastique bleu avec cette étiquette : STAR HOTEL. Il y avait également la photocopie d’une partie d’un plan de New York, de Garment District à Penn Station. Un cercle rouge autour des 30th et 32nd St. J’ouvris alors à contrecœur les deux enveloppes : dans l’une le pistolet, bien sûr. Il était entouré d’un chiffon. C’était un Baby Polymer 9mm compact. Très belle arme. Je n’eus pas le courage de le prendre en main. Je le remballai dans son chiffon. Dans l’autre enveloppe quatre épaisses liasses de billets de banque. Je ne pouvais pas les compter ici. Je pliai le petit bout de plan, plaçai le billet de concert dans la poche de ma chemise, et conservai les clefs. Puis je fermai la mallette, payai mes 7 $ et me mis en route vers l’endroit du plan entouré d’un cercle rouge.

Je trouvai le STAR HOTEL du premier coup. Angle de la 8th Ave et de la 32nd Street : bâtiment blanc, bloc de quatre étages. Devant, sur l’avenue, une boutique de hamburgers : MAMMA ITARDO’S ITALIAN PIZZA. LOTTO & NEWS STAND. Un dais de toile lie-de-vin imprimé de lettres jaunes courait sur le fronton de l’établissement. Dessous, un téléphone avec abri et quelques pas plus loin une entrée. Je sonnai, une caméra vidéo bon marché me surveillait d’en haut : je n’aurais pas été étonné de la voir s’avancer vers moi : « Complet ». Grincement rauque. « On a réservé une chambre pour moi. – Nom ? » J’hésitai très légèrement, cette voix de fausset ne s’adressait qu’à moi : « Talisker. » La serrure vibra, j’appuyai sur la poignée de la porte. Un escalier, dont les dernières marches étaient plus étroites, se dressa devant moi. À gauche, derrière une vitre, à hauteur de poitrine, et dans l’alignement du mur, on se heurtait au guichet de la prétendue salle de direction qui servait aussi de réception. À l’un des deux bureaux était assis un boss de la mafia légèrement trapu. Costume gris clair, veste, chemise, cravate à pois jaune canari. Il me fit signe d’entrer. JACK J.FAIRING – SITE MANAGER. « Vous avez de la chance de nous trouver encore là. – J’ai déjà la clef. – Bob vous l’a déjà donnée ? Quand ? Il ne m’a rien dit. » Il poussa vers moi le registre d’inscription. Il n’exigea aucun passeport. Mais ceci pourtant : « Pas de carte de crédit, pas de chèque, une semaine d’avance. – Combien ? – 40 par nuit. – 30. – 35. – 30. – Okay. Je m’appelle Jack. – Talisker. – C’est votre prénom ? demanda-t-il. – Mon nom. » Il se racla la gorge. Attendit. J’attendis aussi. Je compris ce qui me rendait nerveux : je voyais dépasser d’un paquet de lettres le programme de la Pluto Symphony. Je me repris. Déposai la valise et lui payai ses 210 dollars. À la vue des billets il eut un rictus de cupidité décente. Suivant mon regard, ses yeux tombèrent sur le programme. « Toujours ces imprimés de la poste, dit-il en tirant le dépliant, voulut le déchirer, marqua un temps d’arrêt : au fait, ça vous intéresse ? – Non, non, pas vraiment. » Pendant qu’il le déchiquetait et en jetait les morceaux au panier, la porte s’ouvrit. Un étudiant souriant fit irruption. Rollers sous le bras, joues échauffées. « Je vous présent Bob, dit Jack, et comme au théâtre il se frappa le front : ah j’avais oublié… c’est vrai que vous vous connaissez déjà. » Bob me regarda furieux, mais il ne se souvenait pas de l’affaire. Comme il me conduisait à ma chambre, je lui glissai un billet de 5 dollars. Il ne posa aucune question.
À côté d’une résidente permanente, comme disait Bob, on m’avait réservé une chambre d’angle de dimensions respectables, une fenêtre donnait sur la rue et les deux autres sur l’avenue. Devant les vitres graisseuses pendaient des rideaux qu’il eût été mal venu de laver. Ils seraient tombés en lambeaux. Lit double table de nuit petite commode. Bric-à-brac d’étagères et d’armoires. Découvrant la lampe de bureau avec le chapelet, je songeai : c’est ici que tu vas habiter. « Ça te plaît » demanda Bob. Je me penchai en avant pour regarder par la fenêtre côté rue. Tout en bas, le Deli’s. J’approuvai de la tête. « Ça me va », dis-je. Au-dessus du Deli’s et tout le long de la façade opposée, un MANHATTAN INN qui était visiblement d’un autre standing. Mais les chambres devaient y être plus chères. « Est-ce que Jack t’a dit qu’on va rénover ? demanda Bob. – Ah bon ? – On ferme aujourd’hui. Un tout nouveau concept. Le technohôtel. » Sourire de suffisance juvénile : « Je vais participer aux bénéfices. – Félicitations. – Un jour, si tu veux, je te montrerai des photos. » Je posai la mallette sur le lit. Je fis semblant de ne lui accorder aucune importance pour qu’il ne se doute de rien. « Écoute, je n’ai rien dit, il faut que ça reste entre nous. – Ça ne me regarde pas. – Oh, je dis ça comme ça. Allez, see you. » Je le suivis presque tout de suite pour rapporter les affaires que j’avais laissées à l’ALLADIN’s. J’avais hésité un moment parce que je m’étais demandé si je pouvais laisser l’argent ici sans surveillance.

Lorsque je sortis, les réservoirs d’eau sur les toits m’apparurent comme autant de postes d’observation venus d’un autre monde. Telles des résistances posées sur des tableaux de commandes, ils avaient été installés au sommet des plus hauts immeubles. Certitude rayonnante de l’atmosphère. J’étais déjà moins tendu. Lunettes de soleil. Landaus. Malgré le froid on consommait des glaces. À deux reprises des calèches me dépassèrent. À côté des marches l’homme avait disparu. Panique soudaine. Quelqu’un a dû toucher à mon sac à dos ! Je me ruai dans le petit escalier. On m’avait peut-être subtilisé le billet qui y était caché ainsi qu’une petite somme d’argent que je gardais ne réserve et ma carte American Express. À l’angle d’un couloir – heurtant quelqu’un – « Pardon ! » – Il me donna – « Fuck you ! » – un coup dans la poitrine : visage impavide de bureaucrate. Lunettes de pilote de Porsche. Il me fallut un moment pour reprendre mon souffle. D’un pas tranquille, la brute antipathique s’éloigna. Je me ressaisis, le garçon d’étage avait tout suivi sans manifester la moindre émotion. Puis je vis sa tête faire un mouvement de désapprobation. Je l’ignorai et appuyai sur le bouton de l’ascenseur. Enfermé dans la cage tapissée de rouge, l’inquiétude me submergea de nouveau. Mon walkman, les écouteurs… je passai devant la salle de douche. Je n’avais pas besoin d’utiliser ma clef, la porte de ma chambre était ouverte. Je dus constater que ma précipitation était totalement injustifiée. Les bagages de mes compagnons de nuit n’avaient pas l’air d’avoir été fouillés non plus. Je ne me calmai pourtant pas tout de suite. Pris mon sac à dos et en vérifiai le contenu. Le soleil était haut lorsque, sentant que je me couvrais de sueur, je me traînai au STAR HOTEL, où entre-temps des ouvriers étaient arrivés, montant et descendant les escaliers qui menaient au deuxième étage avec des pioches et des sacs de gravats. Ils avaient bloqué les portes du bas en position ouverte. À droite, en face du bureau de la direction où Jack et Bob avaient entassé leurs affaires, une porte basse en fer entrebâillée découvrait un patio couvert de carton bitumé et débordant de rouleaux de fils, de sacs de ciment et autres bétonnières. Engoncés dans des chandails tachés, les ouvriers faisaient des trous partout. J’avançai. D’une chambre proche on entendait les couinements d’une radio ; la porte s’ouvrit et une souillon d’une laideur indescriptible glissa la tête dans l’embrasure. M’aperçut, reflua et claqua la porte. Bonjour chez vous. Je déposai le sac à dos dans ma chambre. J’ôtai le dessus de lit et la couette. La souillon m’avait rendu méfiant. Les draps avaient l’air propre. Mais lorsque j’ouvris un tiroir de la petite table de nuit, un insecte brun-rouge puant tendit ses antennes puis s’enfuit dans l’obscurité. Je m’étais attendu à quelque chose de ce genre. Quittai immédiatement l’hôtel. Pour acheter un insecticide. Ou pour me changer les idées.Sur une trentaine de mètres une file de camions tentait de se frayer un chemin à travers un chaos de voitures et de corps. Des prêtres des rues étaient là à disposition, les bras tendus, prêchant, chantant. Des déprimés se glissaient au milieu de fous bondissant. On demeurait accroché au cordon ombilical de ce biotope en forme de métropole, faune grouillante de millions de membres. Constante décision de cellules. Elles se multipliaient, dévorées par des brûlures limitrophes, brisée sur les contours par le déclin interne. Tours d’acier babyloniennes, toitures aux ornements Art déco et nuages se disputaient l’espace, tandis qu’en bas se déversaient des engendrements successifs de jaunes de rouges de bleus, taxis, bus, voitures de pompiers clinquantes, files entêtées de rollers passant comme des bancs de sardines sur les deux rives du flot humain. Celui qui levait la tête était un touriste ou un voleur. À peine avais-je débouché dans la 30th St. qu’on me bousculait comme pour m’écarter de mon chemin. Quelqu’un accrocha un de mes talons de la pointe de sa chaussure, ailleurs on entendait des klaxons et le soleil s’imposa brutalement au-dessus de Manhattan. Quel éclair dans les vitrines ! Bravant la foule je redressai la tête : grues urbaines léchant des bouts de ferraille, couleurs s’étageant les unes sur les autres et, plantés au beau milieu, des milliers d’appartements. Les gratte-ciel obéissaient à la tension verticale, tandis qu’à l’horizontale l’espace était occupé par des ensembles locatifs. Des ouvertures comme des bouches hurlantes s’ouvraient sur des kilomètres carrés, suite de démolitions, enfer de ciment pour société dépressive.
En contrebas de la 14th St. ouest l’avenue explosait en mille morceaux. Seul le verre pouvait produire de pareils éclats. Rues faites pour une intimité qui allait s’effilochant. Jolies façades, petites maisons basses comme un océan de cerisiers en fleurs, claires et douces. D’un seul coup tout fut tranquille. Le quartier avait retrouvé ses origines maniérées et, gommant ses aspérités, avait ressuscité la bohème de l’époque de Henry Miller. Astiqué comme une mini-chambre de poupées homosexuelles, l’endroit était incompatible avec le travail et toute activité professionnelle y paraissait obscène. Cinq étages de haut, dix-huit pieds de large : telles étaient les dimensions habituelles d’un brownstone. Portes en merisier luisantes, poignées dorées astiquées avec soin. Puis cirées pour susciter la jalousie des voisins. Des mémères tenaient en laisse des chienchiens courts sur pattes. Entrelacement de grilles d’entrée croisant des escaliers de secours bleus. Un vieil homme assis sur les marches songeait, le regard plongé dans ses plates-bandes de tulipes. Cigare éteint serré entre les lèvres. Deux petites rues plus loin une piscine superbe. Solitude chlorée. Sur le mur de la maison ondulations de reflets turquoise. Les immeubles les plus laids du monde s’arrondissaient au sommet. Découpe grossière d’un angle de bâtiment. Grue immense : insecte mécanique de cauchemar. Et plus loin encore , plus haut : crème de ciment figée déposée au sommet. Et trois étages encore !
Énormes nappes d’eau. Une Lincoln noire fonça à travers les flaques éclaboussant tout sur son passage. Bouches d’incendie à chaque coin de rue. Dans une vitrine, poires mignonnes, brillaient deux seins de silicone. Houston Street. Du sud soufflait encore un vent glacé, mais dans la moitié ensoleillée il faisait très chaud. Il est vrai qu’il était près de midi. Et du haut des toits les étranges retenues d’eau me fixaient toujours : rondes, compactes, leurs pattes minces les faisaient ressembler à des faucheux.
Je m’étais déjà promené en pensées hier soir dans ma rue Lafayette en traversant Spring St. Main Supply For Chinese Cooking. Cris, sirènes. Plus le soleil montait, plus ses rayons étaient perçants. Alternance obstinée de rais lumineux et d’obscurité. Grilles de lumières, murs d’ombres. Puis le ciel se couvrit d’un souffle malsain. Je flottai à travers des échelles de lumière et de pagodes. Et sans prévenir Canal Street : trouées éclatantes. Egg rolls dofu, paquets humains. Les flots des clients étaient tellement épais que je faisais des mouvements de natation pour avancer. Mott Street débordait de touristes. De petits Américains coiffés de casquettes de base-ball flottaient dans leurs shorts. Fanfares, trompettes, hurlements : sons aigus de très loin, c’était une suite de voitures de pompiers, carrosseries rouges et échelles d’argent, qui coupait à travers le flot de métal et de caoutchouc. Entassements, exposition brutale de poissons de crabes de crevettes et de homards. Aquariums pleins à craquer. Gelée blanche dim sum. Gâteau de riz gélatineux. Une descente s’ouvrit vers le métro. Barrière découpée comme des dents. Je pressai mon ventre tout contre, me glissai dessous sans prendre le temps d’en voir davantage. Seafood congee dans le Wonton Tavern tout près de Manhattan Bridge. À proximité de ses gigantesques socles on pouvait calmer sa faim pour cinq dollars. Des centaines de petites cuisines ouvertes répandaient leurs odeurs dans les environs, dans les vitrines, au-dessus de la graisse bouillonnante, des oies brunes et dorées pendues par les pattes ou par le cou dans une boucherie. Un cinéma proposait des films chinois. Et toujours ce nuage jaune empoisonné au-dessus de New York ! Derrière les escaliers de secours, la brique rouge en devenait verte à vomir. Étalages comme on en trouvait autrefois en RDA : emballages poussiéreux d’articles d’électricité, inscriptions et couleurs passées et trépassées. Bocaux de confiture. Papier ondulé. La vieille Chinoise sur l’East Broadway vous toisait avec un de ces regards ! Elle était couverte d’ombre sous ses cheveux d’argent. Le visage tanné par des millénaires de déchirures et d’avancées soudaines …

– Attends une minute : ce n’était pas Talisker, là, à l’instant ?
Je sentis que quelque chose me serrait le cœur de ses doigts glacés –

… Je plissai les yeux. Ne parvins que très lentement à me calmer. Entrai dans un fast food, pris une root beer. Immonde brouet, mélange d’eau, de fructose et de sirop de maïs. Ainsi désinfecté, je me laissai attirer de nouveau par le chaos organisé de ponts, de bois, d’acier et de pierre : me glissai à travers, recherchai les passages, contournai les chantiers, escaladai des barrières, fis des zigzags à travers des passages sur la chaussée entre taxis, bus et camions. City Hall avec son sévère arrondi de colonnades. La figure dorée qui trônait au-dessus des deux niveaux du toit éclairait les magnolias d’un parc en contrebas retourné par des pelleteuses, des bulldozers et des ouvriers de travaux publics. We apologize for any inconvenience. Mais il fallait que je passe de toute façon à travers un labyrinthe de rues, de passerelles et de chantiers. À gauche Brooklyn Bridge, Woolworth Building à droite, le quartier de la finance. Les lilas de Trinity Church répandaient un parfum enivrant. Petite, tout en pierre, l’église néogothique regardait le cañon énorme de Wall Street : le darwinisme capitaliste de son architecture était en réalité un assemblage hybride de cubisme dans des structures maniéristes. À quelques rues de là, pas très loin, la chaussée baignait dans le sang de poisson.



[>>>> Chapitres 31 & 32.
>>>>> en Allemand.
ANH, Le Roman de Manhattan, page de titre <<<<
Alban Nikolai Herbst, In New York, Manhattan Roman.]

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